Magasins traditionnels 2.0 - Retail Council of Canada
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Magasins traditionnels 2.0

Magasins traditionnels 2.0

Comment les détaillants avisés peuvent-ils utiliser l’innovation numérique pour améliorer l’expérience en magasin et améliorer le parcours client

par Jesse Donaldson

Amis détaillants, ne vous inquiétez pas ! Malgré les récentes prédictions annonçant le contraire, les magasins traditionnels ne semblent pas mettre la clé sous la porte pour le moment. Bien que la croissance du commerce électronique ait été plus de dix fois supérieure à celle du commerce de détail physique entre 2013 et 2018, ce secteur représente toujours seulement 10 % des ventes totales. Et, selon une analyse récente de la société de conseil canadienne McKinsey & Co, les magasins traditionnels continueront de générer 80 % des ventes d’ici 2020. Même Amazon, le géant de la technologie, longtemps considéré comme le destructeur des magasins de détail physiques, a reconnu leur valeur en augmentant sa présence sur le plan physique, non seulement en achetant Whole Foods, mais aussi avec des magasins comme Amazon Books, Amazon Go et toute leur gamme de boutiques éphémères dans les centres commerciaux. De plus, l’écosystème technologique actuel offre l’occasion aux détaillants avisés d’aujourd’hui, d’appliquer l’innovation numérique à leurs activités traditionnelles comme jamais auparavant, permettant ainsi de tirer parti de la puissance des données et de la technologie non seulement pour survivre, mais aussi pour prospérer.

« À l’heure actuelle, tous les détaillants traditionnels ont des composants en ligne. », explique Dan Mitchell, responsable de la distribution chez la société d’analyse SAS. « Mais ils combinent très rarement les données de vente en ligne avec les données de vente traditionnelle. Nous savons comment les gens font leurs achats aujourd’hui et que la majorité du parcours client comprend un élément en ligne. Par conséquent, combiner les ventes en ligne avec les ventes en magasin peut procurer aux détaillants une vision plus raffinée de la demande, localisée entièrement autour de leur voisinage. »

Traverser l’allée sans fin

Grâce aux progrès de la technologie et à un ensemble d’outils numériques en constante évolution, les détaillants d’aujourd’hui ont un niveau de connaissance sans précédent en ce qui concerne le comportement en ligne de leurs clients. Cependant, comme le souligne monsieur Mitchell, en ce qui concerne le comportement des clients en magasin, bon nombre de ces détaillants naviguent à l’aveugle.

« Dès que je franchis la porte, ce qui se passe à l’intérieur du magasin, du point de vue des données et de l’analyse, est en grande partie inconnu. », déclare-t-il. « Ce que nous savons sur les données relatives à l’achalandage dans un magasin a tendance à ne présenter que certains points : La porte s’est-elle ouverte ? La porte s’est-elle fermée ? Et la caisse enregistreuse a-t-elle sonné ? Mais maintenant, il y a cette tendance à utiliser la technologie pour mieux comprendre les habitudes d’achat en magasin. Combien de temps le client a-t-il passé dans le magasin ? Était-il avec quelqu’un ? D’où venait-il ? Où a-t-il passé beaucoup de temps ? Les détaillants sont impatients de commencer à collecter ces informations pour mieux comprendre ce qui se passe entre leurs quatre murs. »

Le suivi du comportement du client (qui peut ensuite être aligné sur les données de vente) peut être réalisé de diverses manières. La technologie a atteint un tel niveau que les options incluent les balises Bluetooth, les GPS, les étiquettes RFID, l’Internet des objets, les applications pour téléphones intelligents connectées et même la communication par lumière visible — les impulsions à haute fréquence des lumières DEL qui communiquent avec les téléphones intelligents permettent d’obtenir les positions des clients à dix centimètres près.

Et, comme le note monsieur Mitchell, une fois que les détaillants ont commencé à appliquer la puissance des technologies de l’information en magasin, les applications sont pratiquement illimitées. Plutôt que de servir de simple point de vente, ces mêmes magasins peuvent s’adapter aux besoins des communautés qu’ils desservent, jusqu’au niveau granulaire.

« Un commerçant veut avoir une allée sans fin, où il a des produits à la fois en magasin et en ligne. », explique monsieur Mitchell. « Mais la question est toujours : Quels sont les bons articles à offrir en magasin et ceux à offrir en ligne ? Dans le passé, on appliquait une approche générale. Vous regarderiez le volume total des ventes ainsi que les produits les plus vendus au Canada, et ce sont les articles que vous offririez en magasin. Ce n’est pas une manière très conviviale de déployer une allée sans fin. Il est plus efficace de pouvoir l’adapter selon la géographie. »

Non seulement ces informations permettent-elles des chaînes d’approvisionnement plus agiles et des campagnes marketing plus ciblées, mais elles peuvent également influencer des facteurs tels que la tarification, le placement des associés de vente en magasin et, dans certains cas, la présentation générale des magasins. Et ce qui est encore plus fascinant, cela permet aux rayons mêmes des magasins d’être plus réactifs que jamais à la demande des clients, et non seulement en termes de ce qu’ils désirent, mais au moment où ils le souhaitent.

« À l’heure actuelle, les assortiments des rayons changent mensuellement. », explique monsieur Mitchell. « Un détaillant peut modifier les offres de produits ou le nombre de façades dans un rayon, mais nous allons passer à un mode beaucoup plus en temps réel, où cet assortiment pourrait s’adapter chaque semaine ou jour après jour. »

Valeur ajoutée (numérique)

Il est important de noter que l’introduction d’éléments numériques et technologiques n’est pas seulement une proposition en coulisse; il peut également améliorer l’expérience client de manière plus immédiate en apportant des éléments familiers du monde numérique directement dans le magasin. Prenez Sephora, par exemple. En 2012, le détaillant de cosmétiques a lancé une application, disponible à la fois en téléchargement sur téléphone intelligent et sur les iPad fixes dans les magasins, permettant aux clients de numériser et de rechercher chaque détail des produits qu’ils choisissent, en passant des avis de clients aux historiques d’achat, jusqu’à savoir si le produit pourrait provoquer une éruption cutanée pour certains types de peau.

Déborah Neff, vice-présidente marketing de Sephora, explique : « Nous consacrons nos efforts à offrir des expériences prestiges et personnalisées aux clients, avec des services tels que le QI pour la couleur, les soins de la peau et les parfums permettant à nos clients de trouver plus précisément les produits les mieux adaptés à eux. De plus, nous voulons étendre nos relations avec nos clients au-delà de nos magasins. L’application Sephora permet à nos clients de parler à la plus grande communauté de beauté en Amérique du Nord par le biais des discussions du groupe Beauty Insider Community, de découvrir de nouveaux looks dans la galerie ou « d’essayer » le produit confortablement chez eux avec Sephora Virtual Artist. Nous les accompagnons à chaque étape de leur voyage de beauté. »

À ce jour, l’application a été téléchargée plus d’un million de fois. D’autres détaillants ont essayé des expériences similaires. En 2015, Target a lancé une application pour téléphone intelligent montée sur le panier, qui accueillait les clients avec une tasse de café gratuite, donnait des indications sur les produits et fournissait automatiquement des informations de comparaison détaillées lorsqu’ils approchaient des articles qu’ils recherchaient (tout en fournissant au commerçant des données de localisation actualisées chaque minute). Burberry a expérimenté la technologie RFID pour permettre aux clients de scanner leurs articles devant un « miroir magique », ce qui non seulement donne des détails sur la façon dont ils ont été fabriqués, mais offre également des conseils de style pour savoir avec quels autres vêtements ils pourraient s’agencer. Et en 2012, Hointer à Seattle est allé encore plus loin dans cette expérience. Les rayons de leur magasin de Seattle ne présentaient qu’un seul article de chaque vêtement vendu, permettant aux clients de choisir leur taille et leur ajustement sur une tablette à proximité. Les vêtements étaient ensuite récupérés par la technologie robotique, livrés et payés en utilisant la même tablette. Hointer a depuis fermé son magasin de Seattle et s’emploie à adapter sa technologie aux magasins d’alimentation — un domaine que Mitchell de SAS prévoit de transformer au cours des prochaines années.

« Les magasins d’alimentation sont assez stables depuis longtemps. Et quand il s’agit de l’épicerie numérique, il n’y a pas eu beaucoup d’action au cours des deux dernières années », dit-il. « Mais je pense que d’ici 4 ou 5 ans, 25 % des ventes alimentaires se feront en ligne. Pensez à tous les paniers et au nombre de fois où vous allez faire les courses à l’épicerie. Si un quart de ces paniers débarquaient maintenant à votre porte, quelles en sont les répercussions ?

Embrasser la révolution technologique

Il n’y a pas seulement les grands détaillants comme Sephora et Target qui peuvent tirer parti des technologies de l’information et des analyses. En fait, comme l’explique monsieur Mitchell, à certains égards, les commerces de taille moyenne sont les mieux placés pour plonger dans le numérique.

« Les détaillants spécialisés ont fait plus de progrès », dit-il. « Ils devaient le faire, par nécessité. Ils se battent pour rester en vie dans un créneau spécifique. Mais sur le plan positif, si vous avez moins d’unités de gestion des stocks et moins de magasins, la partie technique de cette opération n’est pas décourageante. Ils sont capables d’expérimenter rapidement et d’avoir des équipes agiles capables d’exploiter ces données. »

Donc, si les magasins traditionnels ne vont pas disparaître de sitôt, à quoi ressemble leur avenir ? Où vont-ils s’intégrer dans le secteur global de la vente au détail ? Plutôt que de disparaître, ils devront croître et évoluer, en intégrant les ventes numériques et les ventes physiques, en exploitant la technologie RFID et IoT, en utilisant des données analytiques et des données pour gérer l’agencement des magasins, les assortiments de produits et le marketing comme jamais auparavant.

« Notre monde se rétrécit au fur et à mesure que la puissance des médias sociaux et du Web démocratise le monde de la beauté pour le meilleur. », explique Deborah Neff de Sephora. « Par conséquent, il s’agit moins de posséder le savoir que de créer des relations et des expériences personnelles authentiques. Pour que les marques gagnent, elles devront être plus qu’une simple destination d’achat. Elles doivent créer une expérience immersive pour leurs clients, hors ligne et en ligne. »

Et ce ne sera pas une transition facile. Cela nécessitera des services des technologies de l’information plus importants, de nouvelles approches de marketing, de nouveaux partenariats commerciaux et de conseil, ainsi que de beaucoup de travail. Mais, cette approche servira les détaillants prospères de demain pour les années à venir.

« Je pense que le plus grand défi est la complexité. », dit-il. « Vous faites face à de nombreux ensembles de compétences; compétences sans fil, analyses de données, analyses avec diffusion en temps réel. Et je pense que nous devons examiner comment nous formons les gens, comment nous construisons nos partenaires d’intégration pour ce faire. Certes, nous voyons un énorme investissement dans le monde entier. Mais je pense qu’il reste encore beaucoup à faire. Il y a beaucoup de compétences différentes qu’une personne seule ne peut pas posséder. Nous devons continuer à créer un écosystème de compétences autour de cette complexité. »